vendredi 30 novembre 2012

un peu de lecture, pour oublier qu'il faut bosser pour payer le loyer

En ce moment, je lis un bouquin un peu écrit avec les pieds parfois, mais bien intéressant. Il y a différents contributeurs, et le style de certains est fort indigeste, mais leur intervention permet toutefois de se faire une idée (en s'accrochant parfois fort aux branches, il faut le reconnaître) des débats qui pourraient exister sur la question.

La question ? Le travail et son avenir. 

Si certains parmi les auteurs débattent, avec des arguments datés, du partage du temps de travail et des 35 heures (le bouquin n'est pas d'hier, je l'ai attrapé sur l'étal de mon bouquiniste préféré de Saint-Michel), d'autres envisagent déjà la situation dans laquelle nous pataugeons à l'heure actuelle.

Ils questionnent la valeur travail, remettent en cause la notion de plein emploi (une notion toute récente, selon certains auteurs, et surtout héritée des Trente Glorieuses) et se demandent si la façon dont on envisage globalement la chose n'aurait pas urgemment besoin d'un bon coup de brainstorming.

Si l'on en croit les joyeuses conneries qu'on continue à entendre tous les jours, d'où qu'elles viennent, cette urgence n'est pas partagée par tout le monde, loin s'en faut.

Je bouquine quelques pages le midi, dans le centre commercial d'une hideur qui dépasse tout que je suis obligée de fréquenter pour ma pause déjeuner, et ça fait du bien à la tronche, au milieu du flot mainstream, clonique et triomphant qui va et vient de boutique en boutique. 

Parfois au sein de la foule se glissent quelques non-inclus, au look improbable, qui flottent là-dessus comme des grumeaux que rien ne saurait dissoudre, ça fait du bien de les voir, même si je me doute que leur vie n'est pas plus facile que la mienne.


jeudi 29 novembre 2012

Tu devrais être contente d'avoir un boulot, par les temps qui courent...

Le matin, on a droit à un mail agressif, genre « Vous êtes des buses, vous ne faites pas vos chiffres, vous craignez tellement qu'on se demande ce que vous foutez là ». Ça met en jambes pour la journée. 

Si un appel dure un peu trop longtemps, on se fait allumer. Les gens à l'autre bout du fil, et qui appellent pour demander des infos sur leur dossier, râler parce qu'ils n'ont pas eu leurs sous, ne sont pas au courant qu'on doit les expédier en 4,30 minutes.

4,30 minutes pour vérifier leur adresse, leurs numéros de téléphone, leur envoyer leurs codes d'accès, les abonner au service de e-relevés, répondre à leurs questions, leur demander s'ils ont tout compris, verrouiller la conversation en leur demandant si on peut faire autre chose pour eux. C'est là que certains repartent pour une autre question et tu ne peux tout de même pas les envoyer chier. Si ? 

En plus, tu dois leur proposer un contrat de prévoyance, parce que si tu ne fais pas tes chiffres, tu vas te prendre un autre mail dans la journée (en plus de celui du matin où on t'a bien expliqué que tu étais une merde) dans lequel ton managueur développe à quel point tu es vraiment une pure merde, tellement tu as eu d'appels et tu n'as pas fait tes chiffres, pas assez proposé de prévoyance, pas fait de bilans, pas respecté les 4,30 minutes de durée moyenne de communication et les 45 secondes de temps de saisie. 

Pour chaque appel, tu dois vérifier le dossier avec un logiciel très con et fort peu convivial (genre toutes les infos sont soigneusement dissimulées à des endroits improbables et pour les découvrir, c'est un vrai jeu de piste à base de trois milliards de clics), et tout en faisant ça, tu dois en même temps (tu es une merde multitâche) renseigner le logiciel de traçage et indiquer pourquoi le gars t'appelle (il y a des menus déroulants dans lesquels tu peux choisir, mais bien sûr, tous les cas n'ont pas été prévus et on  peut te péter la tête si tu ne choisis pas comme il faut), éventuellement lui envoyer un mail avec un doc à l'aide d'un outil agaçant de lenteur (les documents ne sont bien sûr pas centralisés à un seul endroit, ça serait trop simple, il faut aller les chercher à droite à gauche en haut en bas, et si tu perds du temps, tu te sens devenir la grosse merde qu'on t'a déjà expliqué que tu étais), et puis passer rapidement à l'appel suivant.

Mon temps moyen de communication est d'au moins 6 minutes (je crois que je bats tous les records de merditude !!), je suis rarement à l'objectif pour les propositions de prévoyance, j'oublie souvent de réaliser des bilans (des questions à la noix sur les dossiers, surtout destinées à placer encore et toujours des contrats de prévoyance, ça dure des plombes, un message te signale en début de communication que tu dois le faire, mais si la communication est un peu ardue, tu perds le fil et tu te rends compte que tu as oublié le bilan au moment où tu raccroches et tu dis des gros mots...).

Je crains de ne pas avoir un vrai tempérament de commerciale. Je fais ce boulot pour gagner ma croûte, pas par vocation, les conditions dans lesquelles je l'exerce ne me semblent pas propices à un dépassement de ma compétitivité car je ne suis pas du genre que les coups de pompe dans le cul galvanisent.

Cette semaine, on a déjà eu droit à deux mails de notre managueur, qui nous explique que respecter nos objectifs fait partie de notre fiche de poste (pas eu le temps d'aller consulter cette fiche de poste, moi) et qu'il est lassé de nous rappeler à l'ordre constamment.

Pour nous aider à sortir de notre merde, on a le droit aussi à des doubles écoutes en live : le managueur prend un écouteur et nous flique pendant une communication ou deux. Après, il démonte systématique tout ce qu'on a fait, afin de nous aider à progresser, il paraît. Nos communications sont enregistrées de manière aléatoire. Ces enregistrements sont debriefés par tous les managueurs réunis en aréopage, toi au milieu qui te fais redémonter. Si tu te risques à émettre des objections, il y aura toujours quelqu'un pour te dire que le but de la manœuvre c'est de te faire progresser, alors ne le prends pas mal. 

Tu as tout le temps tort, tout ce que tu fais est nul et sujet à caution, il faut admettre le fait dès le départ, sinon tu risques d'y laisser des plumes. 

Le pire, c'est qu'il n'existe aucune solidarité entre collègues, qu'on ne peut absolument pas faire front, parce que notre boulot, toujours au téléphone, avec 10 minutes de pause le matin et l'après-midi fait qu'on ne peut pas échanger plus de 3 secondes avec les autres galériens qui nous entourent. Cela fait deux jours que je n'ai pas pu prendre mes pauses.

Il y a quelques personnes qui respectent les temps imposés sur le plateau d'appels. Nos chiffres sont affichés à côté de l'entrée et les bad boys sont indiqués en rouge. Il y a finalement assez peu de vert, je trouve, si on tient compte du nombre de rappels à l'ordre et de menaces voilées qui sont censés nous remettre dans le droit chemin. 

Je jette juste un coup d’œil de loin certains matins à ce truc pour constater la persistance du rouge, qui me rassure : je ne suis pas la seule merde, finalement. Certaines de mes collègues se délectent de ces informations, je me demande si elles ont une vraie vie en dehors de ce petit univers étouffant et mesquin dans lequel elles s'épanouissent.

J'ai discuté trois secondes l'autre matin avec une de mes collègues, le matin très tôt avant de commencer à bosser, en prenant le café : j'étais soulagée et elle aussi de partager enfin, si peu que ce soit, ces sales moments, parce qu'au bout d'un moment, le mal-être et la colère, tu te persuades que c'est parce que tu es une merde que tu les éprouves.

dimanche 25 novembre 2012

En parlant de Chinois...

Je me suis gondolée comme une bossue en faisant un tour sur le site (très laid) d'une boîte de pas beaux chez qui j'ai travaillé il y a quelques années.

Cette boîte fait fabriquer la plupart de ses produits (des jouets) en Chine, mais sur son site, elle communique haut et fort sur la Fabrication Française et Européenne des ses produits (les majuscules sont d'origine, ces gens n'ont aucun goût et aucune culture typographique).

J'ai travaillé notamment sur la mise en page de leurs packagings avec la boîte qui gère leur production en Chine, et ça m'étonnerait qu'ils aient rapatrié leurs usines en France et en Europe, on en aurait entendu causer dans les chaumières.

Je serais Chinois, je le prendrais drôlement mal.

L'ami Ricoré a des amis dans la pub

La pub, c'est un univers à part. Un monde protégé plein de gens et de meubles blonds. Une fenêtre ouverte sur la quatrième dimension.

Exemple : ils ont tous les deux trente ans ou à peu près. Ils bataillent pour savoir qui va pouvoir se morfaler le dernier gâteau. Le débat est consistant mais courtois. Monsieur a deux réunions dans la journée et Madame une seule réunion mais avec des Chinois. Monsieur objecte qu'il mérite le gâteau parce que lui sa réunion c'est avec les informaticiens, et c'est pire que du chinois, ah ah ah ! Madame rétorque qu'elle a rendez-vous à 11 h 30 avec la directrice de l'école. Monsieur reconnaît qu'en effet, il ne peut pas lutter et concède le gâteau à Madame. 

Passé trente ans, les pubs c'est toujours pour des couches anti-fuites ou des assurances obsèques, avant vingt ans pour des yaourts ou des gels pour les cheveux, je ne sais pas si c'est révélateur, je constate, c'est tout.

Pour en revenir à cette pub, on est quand même très contents que la dame, malgré son emploi du temps hyper de la ouine, puisse assister à des rendez-vous avec la directrice de l'école de son enfant, ça prouve que dans le monde merveilleux de la pub, on peut gratter quelques heures dans sa journée pour gérer sa vie. Essayez dans la vraie vie et vous allez voir comment vous allez vous faire recevoir par votre boss !

lundi 19 novembre 2012

La tête hors de l'eau

Il me reste 2 mois et demi à tenir !


Dans deux mois et demi, la question ne sera plus « Comment je fais pour tenir ? » mais « Comment on fait pour bouffer ? »

Youpi tralala.

Je viens de faire un tour à droite à gauche pour regarder les annonces de boulot et ça donne toujours autant envie de rigoler massivement. 

De ci de là, des blogueurs s'indignent, communiquent leur désespoir et leur impuissance face à une situation qui nous échappe tellement qu'on se reprend à rire, parce qu'il n'y a rien d'autre à faire.

Il y a aussi ceux qui ont des solutions intelligentes à proposer. 

Tiens, l'autre jour au Zapping, un type éructait dans une langue étrangère qu'il allait falloir mettre les chômeurs au pas, qu'il était bien fini le temps où on pouvait choisir de travailler ou pas.

Par parenthèse, quelqu'un a-t-il souvenir de cette époque bénie ? Moi pas. J'ai toujours dû travailler pour payer mes factures et mes menus plaisirs, sauf quand je me suis retrouvée sans boulot sans l'avoir choisi, mais je m'égare. 

Ordoncques, le monsieur disait comme ça d'un ton extrêmement convaincu que c'était bien fini la chienlit et le brossage de mouches, qu'il allait falloir que les chômeurs comprennent que s'ils ne travaillaient pas (vous vous rendez compte : un chômeur qui ne travaille pas, mais le monde est devenu une pétaudière !!!), ils n'auraient pas d'allocation et pis c'est tout !

C'est intéressant comme solution, parce que les allocations que perçoivent les chômeurs, c'est encore, jusqu'à preuve du contraire, des sous qu'ils ont cotisés quand ils travaillaient (avant de décider de ne plus travailler, sur un coup de tête et parce que c'est vraiment des inconscients qui ne prennent pas la pleine mesure de la crise.).

En gros, le monsieur fâché remet en cause un principe bien couillon : sur ton salaire, tu cotises à une caisse de solidarité, pour le cas où tu te retrouverais au chômage, parce que les factures, elles, continueront de tomber. Et que donc, lorsque tu te retrouves au chômage (parce que tu l'as bien cherché, vu que le chômeur, c'est jamais qu'un travailleur qui fait sa mauvaise tête), tu es indemnisé avec ces sous.

Comme dirait l'autre, au moment de te prendre tes sous, tout le monde est d'accord, mais au moment où tu passes à la caisse, y'a toujours une dame pointue ou un type convaincu pour te regarder de travers et te demander si par hasard t'aurais pas un peu un fier culot.


Le truc, c'est que les gens qui travaillent, ils en ont assez de cotiser pour les glandus crasseux qui se complaisent dans leur oisiveté et leur incurie, le Nord en a marre de payer pour le Sud, tout ça tout ça. 

C'est sûr qu'au train où vont les choses, les chômeurs se reproduisant comme des lapins (l'oisiveté mère de tous les vices, histoire connue), la crise s'éternisant et se propageant, le marasme s'installant, les caisses de solidarité sont fort sollicitées.  

La solution est lumineuse : faisons cotiser les futurs chômeurs à des caisses de solidarité et puis refusons-leur une prise en charge décente, foutons-les dans la merde, la misère noire et l'indigence, ça leur apprendra à ces trouducs !

Puisqu'on vous dit que c'est la crise, vous croyez quoi ? Qu'on va vous payer à rester devant votre télé dorloter votre petite déprime ? Qu'on va vous laisser vous empiffrer comme des gorets au Leader Price ?
Ha ça non ! 

Une saine révolte monte et gronde dans le pays, les nantis du RSA et de Pôle Emploi n'ont qu'à bien se tenir, le peuple souverain nimbé de lumière est debout ! Citoyens, l'heure est grave, il est urgent et nécessaire, indispensable et salutaire de faire rendre gorge à ces odieux profiteurs qui nous mangent la laine sur le dos depuis trop longtemps et nous narguent avec leurs odieux privilèges. Nous ployons sous le joug mais déjà nous relevons notre front pur vers les cieux céruléens et, le poing dressé face à l'iniquité, l'adversité et toutes ces choses, nous marchons, soulevés par un espoir immense.

C'est con, ça faisait un moment que je n'avais pas écrit sur ce blog, je reconnais que d'écrire des petites conneries, ça détend.

C'est tout, vous pouvez fumer.